La chèvre aux cornes d’or

Un conte écrit par Clotilde Siramy
 et co-illustré par Clotilde et Manou. 2017

Kokeshi est une petite fille à la peau pâle comme la neige et les cheveux noirs comme du charbon. Elle a des yeux bridés d’un beau bleu profond.
Kokeshi habite en France  mais elle est née très loin d’ici. Elle est née au Japon.
Son papa est japonais et sa maman française. Ils se sont mariés  là-bas et sont revenus en France quand Kokeshi avait un an.
Le trois février, jour de ses 11 ans elle eut la surprise de recevoir une chèvre comme cadeau d’anniversaire. C’est sa grand-mère qui la lui offrait car c’était l’année de la chèvre.

 Kokeshi aime beaucoup les chèvres et s’en occupe très bien. Ce n’est pas étonnant parce que ses parents ont une fabrique de fromage de chèvres bio.
Ils habitent tous les trois dans une bergerie isolée dans les Alpes du sud. Elle aide ses parents surtout pour promener les chèvres les jours où elle n’est pas à école.

La petite fille était toute contente parce qu’elle n’avait jamais eu de chèvre à elle et qu’en plus, celle-ci était très différente des autres : elle avait des cornes dorées.

– Oh, merci grand-mère ! dit-elle en se précipitant dans ses bras.
– De rien, ma chérie, répondit-elle en l’embrassant tendrement, prends en bien soin.

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Elle allait régulièrement en compagnie de sa chèvre se promener dans la montagne mais un jour, la chèvre s’éloigna plus que de coutume et elle la perdit.
Après l’avoir cherché vainement, elle fut obligée de rentrer seule chez elle. Elle se jeta dans les bras de sa maman en pleurant.

– Ma petite aux cornes dorées s’est perdue dans la montagne.
– Ton papa va certainement la retrouver lui répondit-elle en la consolant.
Son papa la chercha  en effet pendant des jours et des jours mais chaque soir il rentrait bredouille et chaque soir la fillette pleurait à chaudes larmes.

Cela faisait pratiquement  un mois maintenant que la chèvre avait disparu et Kokeshi commençait à désespérer de la revoir un jour, lorsqu’un soir de pluie :
– Béééé. Béééé.
On entendit bêler derrière la porte. La petite fille se précipita pour ouvrir.
C’était sa petite chèvre aux cornes dorées.
Kokeshi était tellement heureuse de ces retrouvailles qu’elle sautait de joie.
Lorsque l’heure de se coucher arriva, elle implora sa mère :

– Je peux dormir avec ma petite chèvre aux cornes dorées ?
Elle m’a tellement manqué !
– Oui, répondit-elle avec un grand sourire.

Kokeshi et sa chèvre rentrèrent dans sa chambre.
Entendant parler, elle se retourna, chercha autour d’elle et vit sa chèvre lui poser une question :

– Veux-tu que je te raconte ce que j’ai vécu pendant un mois ?
– Mais … tu parles ? Oui, je veux bien.
– A une condition lui répondit la chèvre, que tu ne le dises à personne.
– D’accord. Raconte-moi s’il te plaît.
– Et bien voilà.
J’étais en train de manger de l’herbe tendre, quand, j’ai voulu rentrer. J’ai réalisé que tu n’étais plus là, du coup comme c’était le soir et qu’il s’était mis à pleuvoir, je me suis dit que je devais me  cacher pour la nuit. J’ai trouvé une grotte, je m’y suis abritée.

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Le lendemain, le lundi, je me suis réveillée devant un terrible monstre avec les yeux jaunes qui voulait me dévorer.

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Je lui ai dit :
– Je ne suis pas assez grosse. Fait-moi grossir.
– D’accord, mais seulement jusqu’à vendredi.

Il avait beau la gaver, elle ne grossissait pas parce qu’à chaque fois elle donnait la nourriture aux petits animaux que venaient la voir au fond de la grotte.
Elle ne voulait surtout pas grossir sinon le monstre allait la manger avant!
Le vendredi elle lui fit remarquer qu’elle n’était toujours pas bien grasse.

– C’est vrai admit-il. Je te laisse jusqu’à dimanche mais pas plus car à force d’attendre, je meurs de faim. Dimanche je te dévorerai même si tu n’as pas grossi.

Il lui redonna de quoi manger et elle continua à nourrir les petits animaux.

– Le dimanche, il s’est jeté sur moi les yeux brillants de convoitise.
Décidée à me battre jusqu’au bout, je fonçais vers lui la tête baissée, les cornes en avant.
J’ai entendu un hurlement terrible et le monstre s’est écroulé aveuglé. Son regard éblouissant s’était réfléchi sur mes cornes dorées lui brûlant la rétine.
J’en ai profité pour m’échapper rapidement.

Kokeshi écoutait attentivement. Lorsque la chèvre se tut, elle lui fit remarquer :
– Mais ce que tu m’as raconté ne dure qu’une semaine et tu es partie pendant tout un mois !
– C’est normal, il est très tard et c’est l’heure de dormir. Je te raconterai la suite demain.

Le lendemain soir, dès qu’elles furent  enfermées dans la chambre, la chèvre repris son récit.

– Après m’être échappée, j’ai voulu retrouver mon chemin.
J’ai rencontré une chèvre qui cherchait aussi le sien. Nous avons brouté et discuté ensemble.

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Elle m’a dit qu’elle était perdue.

– Je ne suis pas très loin de chez moi, car j’entends mon maître m’appeler mais je ne sais pas où il est.
Je lui ai répondu :
– Moi je pense savoir qui c’est. Peux- tu me le décrire s’il te plaît ?
– Il porte une peau de mouton en guise de manteau, un chapeau rouge et il a toujours un bâton dans la main. Son chien est un berger allemand gris et noir.
– C’est bien l’homme que j’ai vu. Je sais où le trouver.

Nous sommes donc parties ensemble tout en discutant.
Comme nous nous étions arrêtées au bord de la rivière pour y boire, un loup surgit et se précipita sur mon amie.

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Nous avons lutté courageusement pendant toute la nuit. Finalement, le loup s’est enfui au lever du jour parce qu’il en avait assez que nous nous acharnions sur lui. Ce qu’il redoutait le plus, c’était le tranchant de mes cornes dorées.
J’ai raccompagné ma nouvelle amie jusqu’à sa bergerie.
Son maître l’a prise dans ses bras tout heureux de la retrouver.
Pour me remercier, il m’a demandé si je voulais rester un peu pour me reposer.
J’ai repris la route le dimanche matin.

– Maintenant, il est l’heure de dormir. Je continuerai demain.

Le soir du lendemain, aussitôt dans la chambre, la chèvre reprit son récit.

– Quand j’ai quitté la bergerie, j’ai tenté de retrouver mon chemin. Je me suis à nouveau trouvée devant une grotte et à nouveau, poussée par la curiosité, j’y suis entrée.

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Sitôt à l’intérieur, des hommes se sont jetés sur moi et m’ont capturé.
D’après ce que j’ai compris, j’étais dans l’enceinte d’un site secret de lancement spatial.
Une fusée s’apprêtait à décoller mais la chèvre qui devait  embarquer était malade.  J’arrivais à point nommé pour la remplacer. Ils m’ont enfilé la tenue de cosmonaute conçu pour elle, m’ont mis dans la fusée et l’ont faite décoller.

Une fois dans l’espace la porte s’est ouverte. Toujours poussée par ma curiosité,  je suis sortie. Mon combinaison spatiale me permettait de flotter agréablement dans l’espace.
J’ai ainsi pu approcher plusieurs planètes dont la nôtre bien sûr.

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Mon périple a duré plusieurs jours puis la fusée a été programmée pour revenir sur terre.
J’étais en parfaite forme.  J’avais bien rempli ma mission, ils m’ont donc libéré.
Toute cette histoire m’a pris une bonne douzaine de jours.

Il m’a fallu encore trois jours supplémentaires pour enfin arriver jusqu’ici.

Le premier jour j’ai croisé Léon le scorpion qui se promenait avec sa femme Donzelle et ses deux enfants Scornelle et Coccipion. Ce soir-là, j’ai préféré dormir à la belle étoile plutôt que de rentrer dans une grotte.

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Le deuxième jour je me suis retrouvée devant un étrange et monstrueux lézard.
Je lui ai demandé à quelle espèce il appartenait mais il ne m’a pas répondu. J’ai donc passé mon chemin et me suis endormie dans un creux rempli d’herbe.

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Le troisième jour j’ai rencontré deux petites filles qui faisaient une randonnée. L’une s’appelait Delphine et l’autre Clotilde.

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Je leur ai demandé si par hasard elle connaissait  Kokeshi ma maîtresse.

– Bien sûr, répondirent-elles en cœur, c’est notre amie.
Du coup je leur ai demandé si elles ne pouvaient pas me renseigner sur le chemin à suivre, ce qu’elles ont fait gentiment. C’est comme cela que je suis revenue jusqu’à toi.

– Voilà toute l’histoire. Maintenant, après toutes ces mésaventures  j’aimerai bien rester tranquille et ne plus jamais te quitter.
– Et moi je ne veux plus te perdre non plus ajouta Kokeshi. J’étais trop malheureuse quand tu n’étais plus là.

Elles s’endormirent toutes les deux.
Depuis ce jour, jamais plus Kokeshi n’entendit sa chèvre lui parler et jamais plus elles ne se quittèrent.

Fin.

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